Et moi, pourquoi je fais ce que je fais ? Parce que je viens d'une famille très dysfonctionnelle où j'ai pris le rôle de confidente dès le plus jeune âge. J'ai été "la psy" depuis toute petite. Même à l'école maternelle j'ai le souvenir de consoler les autres enfants. J'ai voulu soigner ces membres de ma famille névrosés que je sentais malades et tourmentés. Dès l'adolescence je leur disais "d'aller voir un psy". Ils n'y sont pas allés. Et lorsque j'ai dû choisir un cursus d'études, bien que très attirée par la psychologie, je me suis dit qu'avec mon hypersensibilité, la froideur et recul requis, je n'y arriverais pas. La vie m'a rattrapée alors que j'étais enseignante de Français Langue Étrangère dans le privé, des apprenants adultes en cours individuels en entreprise ont commencé à me dire : "Aujourd'hui, on fait thérapie, hein !?" Bon. Je me suis formée. Et surtout, surtout, j'ai commencé moi-même à me soigner, m'auto-guérir. Et ce n'est jamais fini. C'est chaque jour. La croyance selon laquelle les personnes qui sont dans l'accompagnement seraient exemptées d'expérimenter la vie est fausse.

C'est là toute notre humanité et c'est depuis cet endroit-là précis que l'on peut accompagner, depuis notre vulnérabilité. Si je n'avais pas plongé moi-même dans cette piscine, comment pourrais-je te dire de t'y jeter toi ?

L'un des outils de travail sur moi qui m'a le plus aidée à descendre dans mes bas fonds, mordre la poussière et voir vraiment les méandres de mon caractère, c'est l'Ennéagramme. En stage de 10 jours en immersion avec 90 personnes, les égos sortent à la surface tels des monstres et on peut enfin toucher du doigt ses propres blessures et celles des autres. Compassion, immense compassion. Et vraie empathie. Pour soi, pour l'autre. Être témoin de la souffrance de l'autre et montrer la sienne au grand jour est incroyablement réparateur. Vulnéralibité.

L'autre chemin guérissant sur lequel je me trouve est celui du clown. Rire de soi. Honorer d'abord, puis pouvoir en rire, rire de tout ça. Mais honorer d'abord. Souvent lorsque l'on rit de soi, on ne prête pas attention et l'on s'humilie soi-même, on se meurtrit. En clown aussi j'apprends à montrer ma vulnérabilité, c'est ma profonde humanité et mon authenticité qui fait rire. Mon ridicule, mon absurde, ma maladresse. C'est ça qui est beau en moi.

"À l'école" : Le cursus de Gestalt que j'ai suivi à Barcelone à l'Institut Gestalt est un cycle avant tout expérientiel qui dure 4 ans, au-delà de la théorie, on travaille sur soi en profondeur. On se doit de suivre un processus individuel en parallèle à hauteur de 60h de thérapie, puis un certain nombre d'heures de supervision collective. Une chance inouïe. Ces supervisions sont le lieu de la vulnérabilité en tant qu'être humain. En quoi ces personnes qui viennent à moi me font miroir ? Qu'est-ce qui les attire à moi ? Qu'est-ce que j'en apprends ? Mon environnement ne serait que le reflet de mes sujets inconclus ? Gestalt siginifie le cycle de l'expérience. Quand une situation n'a pas été résolue, elle remonte à la surface jusqu'à ce qu'elle le soit.

"Dans la vie". La Gestalt est définitivement un art de vivre, en observation et conscience constantes, je me responsabilise. La posture de l'apprentissage continu et de n'être jamais arrivé est fondamentale. À chaque instant je me rends compte : que ressent mon corps, quelle émotion je bloque ou exprime plus facilement, qu'est-ce que je me raconte dans ce mental indompté qui me parasite ? Revenir au corps, revenir au corps, respirer. Me reconnecter. La pratique attentionnelle, le mindfullness, l'awareness. Prendre conscience. Sentir.